Les tentes de toile s’étendent dans le paysage de nos villes et plus encore dans les Métropoles où l’urbain rime avec l’inhumain dans une indifférence mettant à mal les valeurs de notre civilisation, lesquelles ne sauraient pourtant être détachées de la fraternité.
Tout a été dit ou presque avec des mots justes sans qu’ils parviennent à faire se lever les consciences pour que des portes enfin s’ouvrent à destination de ceux qui, sans bruit, espèrent que leur situation inacceptable sera enfin prise en compte.
Entre le triptyque républicain qui s’affiche dans le haut de nos bâtiments publics et la misère qui s’étale sur les trottoirs, un hiatus. L’opinion ne se serait-elle pas accoutumée.
A trop s’habituer, sombre l’urgence d’habiter cet essentiel qu’est le toit. Là où il est absent, l’exclusion s’empare des personnes leur enlevant tout avenir, les jetant dans une inique opprobre jusqu’à ne point être regardées.
Observons ce dramatique malentendu au sein de la Société. Alors que nos concitoyens ne cessent de s’interroger sur la question du sens. Si ce mot est sur toutes les lèvres, il demeure une parole incapable de faire se lever des lendemains plus humains à l’attention des plus fragiles,
Quel souci avons-nous de ceux qui restent dehors. Nous ne pouvons pas nous réfugier dans l’idée d’un ailleurs, traduisant le refus de l’hospitalité alors qu’elle est envisageable rapidement dès lors que se font jour, au cœur des villes, des milliers de lieux inoccupés, fermés, vacants.
L’heure n’est pas de dénoncer, mais d’énoncer des propositions pour faire naître des liens. Nos villes ont besoin d’entendre le Petit Prince ; il nous dirait l’aberration que 320 000 logements, de l’aveu même du Ministère du logement, sont vacants dans les villes et grandes villes.
Impossible qu’il n’y ait pas des centaines, voire des milliers de propriétaires qui acceptent d’en ouvrir les portes dans le cadre d’une relation dynamique visant la revalorisation du bien en veillant à ce que le loyer soit adapté aux ressources de ceux qui peinent à se loger.
Habitat et Humanisme via sa foncière solidaire, Entreprendre pour Humaniser la Dépendance, propose un bail à réhabilitation dont la durée est en fonction du coût des travaux et du temps nécessaire pour être remboursée des fonds propres qu’elle peut avancer pour les exécuter.
Qui n’entend pas le malaise des soignants soulignant le peu de reconnaissance sociale dont ils disposent. Ils soignent, mais ne bénéficient que de peu d’attention. La rémunération des auxiliaires de vie, des aides-soignants, alors que leurs horaires sont décalés, les obligent à se loger loin des lieux où ils s’investissent, d’où des temps de transports qui ne font qu’aggraver la pénibilité de leur engagement.
Qui peut rester sourd au fait qu’un étudiant sur cinq a des conditions de vie inacceptables pour devoir supporter des loyers décorrélés de leurs ressources, d’où un reste pour vivre qui n’est pas sans affecter leur santé.
Oui, levons les yeux et voyons ces logements qui, sans lumière et pour cause, mettent dans l’ombre ceux qui pourtant éclairent nos vies par leurs soins ou encore par leurs études, se préparant à prendre la relève.
S’associer à ce programme, c’est participer à des liens qui, rejetant l’absurde, offrent une sagesse dont chacun pressent l’urgente nécessité.
Bernard Devert
Octobre 2024
