La fraternité, un combat contre l’indifférence

Lutter contre la lèpre, cette misère qui défigure et souvent détruit la cohésion sociale est un des combats permanent d’Habitat et Humanisme.

Au fil de ses quatre décennies, l’association a évolué apprenant des personnes dont elle s’est approchée à devenir – j’ose l’expression ‑ des soignants. L’acte de bâtir se présente, davantage que par le passé, comme un acte de soin. Il s’agit de concevoir des espaces de vie facilitant la réparation des fractures sociales et des dommages qu’ils causent.

Cette réparation est liée à l’accompagnement qui s’impose pour écouter et comprendre. Que de relations, au cours de ces 40 ans, ont suscité des fraternités inattendues. Là où nous en sommes de nos engagements, sans forcer le trait, Habitat et Humanisme se révèle un « urgentiste social ».

Face à la grande fragilité, l’urgence nous mobilise refusant que des femmes, des enfants et des hommes voient leur dignité bafouée pour ne point disposer d’une hospitalité ; elle commence par un toit, singulièrement manquant. Difficile de ne pas être touchés par les désespoirs dont nous sommes témoins.

Les causes sont plurielles mais l’une d’elles, qui fait le plus de mal, est l’indifférence, cancer de l’âme.

Nos 59 associations qui participent cette année au 40ème anniversaire de la création du Mouvement se rencontrent, pas d’abord pour un moment de fête mais de reconnaissance à l’égard de ceux qui ont rendu possible l’aventure et la poursuivent. Il s’agit d’un temps de réflexion visant à désarmer ces forces qui paralysent l’acte de construction.

Ces forces font du mal. Observons combien l’opinion publique s’est habituée au constat du mal-logement, paralysée alors que des centaines de milliers de ménages ou de personnes isolées sont en attente d’un logement décent.

Quand la désespérance se tait, se prépare l’éclatement d’une Société dont les signes avant-coureurs sont déjà installés.

Aider les êtres à moins souffrir et à mieux vivre, voici la mission qui nous est impartie ; elle n’est pas étrangère à l’amitié spirituelle que le Pape François nous partagea, soulignant dans sa dernière encyclique les conséquences fraternelles et sociales qu’elles suscitent, celles-là mêmes que nous souhaitons développer.

Ensemble, nous percevons combien l’humanisme dévoile l’inacceptable. Il est essentiellement un regard, non pas habitué, mais habité par le refus de l’endormissement. Alors s’invite l’audace de rechercher ce que nous devons changer en nous-mêmes pour faire changer ce qui doit l’être. Là, commence l’idée de résistance, mot-clé du vocabulaire d’H&H.

L’esprit de résistance donne naissance à la solidarité dont vous êtes les acteurs, source de ces liens avec ceux qui n’en avaient plus ou pas ; vos mains ouvertes ont donné naissance à des lendemains inattendus, traces d’une réparation du tissu social.

Il nous faut redoubler d’efforts. Le sujet n’est pas de geindre mais de se mobiliser plus encore pour mieux répondre aux SOS que nous recevons.

A chaque fois, il faut se lever pour relever. Nous n’y parvenons pas toujours, tant s’en faut, mais nous devons au moins écouter le craquement des cœurs, là surgit aussi l’énergie pour que ne s’éteigne pas le souffle de la fraternité, lumière d’un monde plus humain.

Bernard Devert
Avril 2025

Laisser un commentaire