La fraternité, une valeur à protéger pour le respect de la vie, de toute vie

La fraternité, pépite des valeurs de la République et de notre civilisation ne serait-elle pas rudoyée, comme si elle était d’un autre temps. Ce qui vient de se passer cette semaine à l’Assemblée Nationale avec le rejet de débattre du projet de loi sur l’immigration n’en serait-il pas un indice.

Où allons-nous !

L’Hémicycle, ce lieu sanctuarisé de l’échange, s’est présenté comme un espace de crispation et du refus de s’écouter, les partis politiques se révélant plus attentifs à rechercher la lumière du pouvoir que celle d’éclairer de nouveaux possibles.

Il manque la voix des prophètes qui, attentifs à la fragilité, comme celle de Victor Hugo, s’écrieraient à leur tour : « vous n’avez rien au cœur qui vous déchire ».

Cette déchirure nécessaire est une ouverture pour mieux se comprendre et s’entendre.

Et maintenant…

Le projet de loi sur l’immigration a ses limites, ses insuffisances, mais aussi des avancées, lesquelles peuvent être singulièrement saccagées si d’aventure l’Aide Médicale d’Etat (AME) devait être refusée pour retenir le vote des Sénateurs.

Certes, la Commission des lois de l’Assemblée Nationale marque son opposition, seulement, le texte va revenir auprès d’une Commission paritaire, conférant à la Haute Assemblée une position, si ce n’est dominante, du moins déterminante.

Les Députés ont-ils également pris conscience, dans leur refus de voter le texte, des crises que traversent nombre d’activités qui bien que qualifiées d’essentielles sont en tension, comme celles de la santé, l’hôtellerie, l’entretien…

Difficile de se mettre à distance du malaise que connaît l’hôpital en raison notamment du nombre insuffisant de soignants qui, harcelés par la dictature de l’horloge, sont contraints à faire vite, très vite ; ils ne cessent à bon droit de rappeler leur mal-être pour n’avoir pas la possibilité d’assurer ce prendre-soin se révélant le cœur même de leur engagement ; ne traduit-il pas l’attente des soignés.

Est-il raisonnable de fermer des services dans les hôpitaux et de faire peser sur les soignants une charge de travail pour ne pas ouvrir des postes à des personnes issues de pays lointains, qui rejoindraient les 70% des auxiliaires de vie et des aides-soignants venus, pour un grand nombre, d’Afrique.

Ces immigrés, désormais parfaitement intégrés, ne sont pas une charge, ils sont une chance.

Il conviendrait de faire reconnaître l’apport qui est le leur au sein de la Société. Nombre de réserves et d’oppositions alors tomberaient. Je pense à la réflexion de cette personne âgée que la dépendance et la solitude obligèrent à rejoindre un Ehpad. De son propre aveu, opposée aux immigrés, elle le fut jusqu’au moment où elle prit conscience que c’était ceux, venus de très loin, qui étaient les plus proches, la rejoignant jusque dans son intimité blessée par le grand âge.

Une fraternité inattendue ouvrit son horizon.

Nous ne voulons pas davantage voir et sans doute ne pas donner à voir le labeur silencieux et besogneux de toutes ces personnes, comme celles qui se lèvent à 4 h ou 5 h, pour être loin de ces bureaux qu’elles nettoient afin que nous les trouvions propres au moment où nous commençons notre travail.

L’immigration n’est-elle pas une chance !

Ne pas le reconnaître, c’est s’enfermer dans des idéologies qui répètent de sempiternelles oppositions, mettant à mal la fraternité qui, seule, suscite la résilience, condition d’une Société plus humanisée.

Saurons-nous en prendre le risque.

Bernard Devert
Décembre 2023

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