« Je suis le pain de vie descendu du ciel ».
Cette parole de Jésus va susciter un abîme et accroître les malentendus qui déjà se font jour ; la plupart de ses auditeurs ne veulent plus suivre, tant sa proposition de vie leur semble énorme et, pour tout dire, folie. L’homme est devenu menaçant pour le Fils de l’homme.
Acceptons-nous d’entendre que ce pain est un pain rompu qui ne peut être reçu que si nous acceptons de rompre avec ce que nous qualifions de sagesse, notre alibi pour ne point bouger.
Rompre, c’est quitter des habitudes pour habiter des perspectives nouvelles. Toute la bible est une invitation à quitter, à se quitter – ‘quitte ton pays’ ; ‘veux-tu me suivre’ ; ‘va’.
Refusant les ruptures entre terre et ciel, raison et foi, corps et âme, liberté et grâce, temps et éternité, Jésus nous invite à rompre avec les schémas de compréhension qui trop souvent nous enferment.
Cette rupture est une clé pour saisir que la parole ne saurait être extérieure à nous-mêmes. Elle nous est offerte pour être chair de notre chair : « Ceci est mon corps » pour que nous rentrions en communion avec Celui qui est source de la vie. Incroyable ! Ce pain ne serait-il pas ce don qui, secrètement, donne corps et cœur pour entreprendre ce voyage intérieur nous invitant à la christification de nos vies.
La tentation est de limiter cette rupture, de la rendre admissible jusqu’à refuser ce pas de l’impossible qui pourtant nous est proposé. Reste avec nous, diront les disciples d’Emmaüs, il se fait tard. Ils veulent conserver ce qu’ils ont découvert non sans joie. Jésus les invite à aller plus loin. Le Ressuscité s’effacera de leurs regards pour leur permettre d’entrevoir autrement sa présence. Alors seulement, ils seront présents à eux-mêmes, saisissant qu’ils ne peuvent pas poursuivre le chemin qu’ils avaient envisagés.
Une autre voie se propose à leur histoire ; quittant leurs villages, ils deviendront des bâtisseurs de la nouvelle Jérusalem : la rupture s’est opérée, leur vie en est transformée et même transfigurée.
« Je suis le pain de la vie, celui qui mange de ce pain n’aura plus jamais faim ».
Entendons, plus jamais faim de ces inessentiels mais faim d’un autrement pour cheminer avec des cœurs « tout brûlants » habités par l’Esprit qui fait trembler nos sécurités pour s’éveiller à cette rupture qui porte la trace d’une résurrection commencée.
La crainte, voire la peur de l’inconnu, se transforme en une reconnaissance donnant naissance à des relations absolument nouvelles. S’ouvre un espace étonnamment autre pour être libérés de cette pesanteur altérant le présent et compromettant l’avenir.
« Si quelqu’un mange de ce pain il vivra éternellement et le pain que je donnerai, c’est ma chair pour le salut du monde ».
C’est trop, disent les auditeurs de Jésus, trop fort, trop grand, trop fou, trop incompréhensible. Notre drame ne serait-il pas justement de vouloir tout limiter jusqu’à concevoir paradoxalement un Dieu tellement autre qu’il ne puisse nous rejoindre.
Un Dieu intouchable, pour ne point risquer d’être touchés. Seulement, Jésus, comme Pain de vie, nous parle autrement pour vivre autrement.
L’aventure de la foi ici commence.
Jésus s’est-il d’abord assuré, avant de rompre le pain, que les deux gars rencontrés du côté d’Emmaüs étaient bien en état de grâce selon les critères du Droit Canon?
A-t-il eu raison de ne pas interdire à Judas de partager le pain et le vin avec les onze autres et lui?
Bonjour mon Père,
Actuellement en période de réflexion professionnelle, votre parcours m’interpelle et résonne avec ce que je peux vivre aujourd’hui. j’aurais souhaité pouvoir échanger quelques mots ou lignes avec vous.
J’espère qu’il vous sera possible de répondre à ma demande.
merci en tout cas pour votre actions