S’unir sur les valeurs de responsabilités

Si rien ne finit jamais, tout est devenir, tout est à venir, comment ne pas observer que ces mots si riches de promesses d’un monde meilleur sont démentis par le repli sur soi, refus de ces autres en situation de vulnérabilité.

Le résultat des élections américaines en est un triste signe.

La campagne électorale, dommageable pour la démocratie, fut dominée par l’indécence, l’adversaire étant considéré comme un ennemi sur lequel on tira à « boulets rouges » avec des propos absurdes, les cris l’emportant sur la réflexion et la recherche d’un discernement.

La pensée d’Alexis de Tocqueville a été singulièrement bafouée, si nous voulons bien nous rappeler qu’il considérait que le plus grand avantage de la démocratie aux États-Unis était sa capacité à promouvoir l’égalité sociale.

Une campagne dominée par la violence, à commencer par celle de l’argent. Jamais les budgets n’ont atteint de tels montants pour s’assurer le pouvoir.

Dans un tel contexte, la fragilité bafouée n’est plus perçue comme une valeur pour être entendue comme une faiblesse.

A continuer ainsi, nous allons tous vivre comme des fous, rappelait Martin Luther-King, prophète de la lutte contre la discrimination, payant de sa vie sa détermination à ce que chaque homme, quelles que soient sa culture, sa couleur, son histoire, soit reconnu dans une égale dignité.

L’heure est de rêver un autre monde, plus encore de le bâtir pour s’éloigner des facilités qui ne mènent que vers les abîmes.

L’urgence est de ramer à contre-courant afin de susciter un autre avenir que celui, si bien entretenu par des illusions d’une hyper financiarisation de l’économie, laissant croire à un ruissellement, ce leurre qui ne rejoint pas les plus fragiles, ou si peu.

L’intervention de Mme Kamala Harris à l’université Howard où elle reconnut sobrement et avec élégance sa défaite face à M Donald Trump fut brève, mais non sans hauteur de vue, soulignant avec cette allégorie que c’est lorsque le ciel est sombre que les étoiles innombrables sont visibles.

Mme Harris appela la jeunesse à ne point sombrer dans un fatalisme. Un autre monde est possible. Les commentaires des journalistes furent quelque peu dubitatifs sur les propos de la candidate ; les étudiants, tout au contraire, percevaient la confiance qu’elle leur témoignait, trace d’une lumière ; comment s’en étonner, n’est-elle pas au rendez-vous chaque fois que l’on fait appel au meilleur sommeillant en chacun.

Aucune arrogance, une reconnaissance de son échec et une conviction que les Etats-Unis ne s’égareront pas des valeurs sans lendemain.

Le sujet n’est pas seulement d’être les premiers, délaissant les plus pauvres, mais de créer des relations traduisant un effacement du tout, tout de suite, ce désir de puissance mettant à distance et dans l’indifférence ceux qui n’ont rien ou si peu.

Comment peut-on être unis dans de telles conditions.

Les dangers d’une altération de la solidarité internationale avec cette élection sont importants ; il est bien de les évaluer, il est mieux encore de se mobiliser pour une Europe unie afin que l’esprit qui l’a fait naître retrouve toute sa vigueur et plus encore que nous ne confondions pas notre cathédrale avec la somme des pierres, pour reprendre les mots de Saint-Exupéry.

Bernard Devert

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