Au nom du Père, au nom des frères

Nos frères, nous rappelle la Bible, sont souvent des exilés.

Abraham est appelé à quitter son Pays pour une terre qu’il ne connaissait pas.

L’histoire d’Israël est parcourue d’exils. Que de frères doivent se mettre en distance de leurs terres devenues si inhospitalières que leur vie est menacée.

Le tragique qui traverse l’histoire se poursuit, notamment mais pas seulement, au Proche-Orient.

Au nom du Père et au nom de ces frères, il nous faut vivre la fraternité ; comment ne pas se rappeler, comme peuple d’Evangile, qu’elle n’est pas une option mais une obligation éthique et spirituelle.

Cette fraternité, si elle est une charge, elle est aussi une chance.

Une charge partagée de par une réelle mobilisation, témoignant d’un réalisme prégnant d’une attention vivante et espérante à la grande question du Livre de l’Humanité : « Qu’as-tu fait de ton frère » ?

En vous partageant cette chronique, je pense à cette dame âgée qui m’écrit : « les fins de mois sont dures aussi pour nous » ; s’excusant de donner si peu, elle propose immédiatement, malgré l’âge et la fatigue, d’aider des réfugiés à appréhender notre langue. Quel magnifique don du cœur.

Cette charge, elle l’assume avec une telle générosité qu’elle se présente comme une chance d’être davantage des vivants. Les différences et les difficultés ne sont pas niées ; elles sont traversées.

Et si les exilés nous offraient la chance de découvrir aussi un chemin de l’exode, celui d’une liberté pour être davantage libérant.

Quel programme.

J’aimerais que vous puissiez voir ces photos sur notre site de Bonnelles où des Syriens et Irakiens, sur un terrain de foot, avec d’autres jeunes de la commune, témoignent d’une fraternité qui fait que les exilés se mettent sur un chemin d’exode, celui-là même d’une promesse ; un avenir se fait jour.

Peuple d’Evangile, nous voici appelés à vivre pour faire tomber des frontières.

Une chance pour grandir dans notre humanité.

Une chance pour que notre terre plus humaine porte la trace d’un déjà-là du Royaume.

Finalement, la chance n’est-elle pas pour chacun d’entendre : quitte ce qui t’enferme pour t’ouvrir à l’inattendu.

Sortir de soi-même, marcher sur des chemins dont nous ne savons pas tout à fait où ils nous conduisent, mais qui signent l’appel confiant qui, depuis le fond des âges, se fait entendre : « Qu’as-tu fait de ton frère » ; qui peut s’éloigner d’une telle responsabilité où l’être, quelle que soit son histoire, est reconnu.

Les réfugiés nous réveillent. N’est-il pas l’heure découter les mots du poète Rabindranàth Tagore :

« Je dormais et je rêvais que la vie n’était que joie.

Je m’éveillais et je vis que la vie n’est que service.

Je servis et je compris que le service est joie ».

Bernard Devert
Septembre 2015

5 commentaires sur “Au nom du Père, au nom des frères

  1. Bernard, je te reconnais bien là dans ce texte. Tu as toujours été d’une générosité sans limites. Et bien-sûr, je suis d’accord avec toi : nous devons accueillir ces gens qui ont tout perdu dans la guerre dont ils sont les premières victimes et/ou qui ont tout laissé derrière eux, préférant risquer la mort en chemin, pour atteindre l’Europe et un avenir qu’ils pensent meilleur. Mais après l’accueil, que pouvons-nous faire, nous Européens, vis-à-vis d’eux ? C’est à mon sens une vraie question, et je ne vois pas un début de piste de réponse. Il y a consensus pour les accueillir c’est certain, mais lorsqu’on voit un petit peu plus loin, personne ne semble avoir de réponses quant aux moyens et possibilités dont nous disposons pour leur offrir autre chose qu’une vie de misère et de SDF, d’où la marche arrière de beaucoup d’Européens qui refusent de les accueillir. Et dire « On les accueille et on verra bien après » n’est, je crois, pas une réponse.

    1. Chère Nadine,

      ‘Voir après’ n’est sans doute pas une réponse concrète mais c’est une détermination à la chercher pour ne point abandonner ceux qui nous ont fait confiance.HH a mobilisé des logements justement pour cet ‘après’. Il nous appartient de voir comment nous pouvons nous inscrire dans un accompagnement. J’entends bien que le plus facile est cet hébergement à Bonnelles ; il est limité dans le temps en tout cas avec ceux-là mêmes qui furent accueillis le 9 septembre. Toutefois il est un foyer qui allume des braises inattendues qui ne sont précisément pas indifférentes à l’après’.
      Très cordialement.
      Bernard Devert

  2. cher président fondateur,
    encore une fois la profondeur de vos propos me renvoient cette phrase du poète indien que vous avez choisi (à juste titre d’ailleurs), mais il semble qu’il soit un peu oublié aujourd’hui. Une autre grande conscience Pierre Rabhi (qui a fondé un mouvement « Terre et Humanismne »)explique que nous avons dépoétisé notre rapport à la terre.
    le texte choisis par vos soins m’ a rappelé en mémoire qu’elle s’avérait être la devise que j’ai choisie quand j’ai décidé de m’engager dans les métiers du social il y a 30 ans. merci de l’avoir proposé à vos lecteurs; très chaleureusement
    bruno janvier

    1. Cher Bruno Janvier,
      Merci pour votre message chaleureux et amical. Ensemble, donnons place à la poésie qui ouvre un rapport sur le mystère libérant les clivages.
      Je crois que l’on ne pense juste que poétiquement. Très cordialement. Bernard Devert

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