Le sang de plus de 132 de nos concitoyens, en moins de deux heures de temps, a été répandu par des hommes ignobles, sans conscience.
Si l’heure est celle du deuil, le crêpe ne voile point l’urgence d’agir plutôt que de réagir. Les mots sont nécessaires pour dénoncer le mal, mais les mesures pour le combattre le sont davantage encore.
Théophile, un jeune de 18 ans, précisait samedi soir que, atterré par le drame, il était fier d’observer que la France, terre de liberté et du respect de la vie, était le premier des ennemis des islamistes.
A l’aveugle, les terroristes ont tiré. Ils n’avaient d’autres cibles que de faire mourir et souffrir le plus de personnes possible. Quand le sens de l’humain est aussi dépravé, alors la bête immonde humilie les valeurs d’humanité, balayant toute tolérance.
Nous ne capitulerons ni ne fuirons devant un tel ennemi. La liberté ne se négocie pas, il s’agit de la défendre. Chaque génération la reçoit en lui offrant si nécessaire le tribut de la vie pour qu’elle ne s’assombrisse point.
Un combat inévitablement s’engage. N’est-il pas déjà gagné par la liberté intérieure d’une Nation éminemment libre. Point de vengeance, ni de peur devant cette horde des barbares appuyant sur la gâchette de leur kalachnikov pour n’avoir d‘autre appui que celui pitoyable de semer l’effroi.
Quel contraste entre ces lâches qui fuient, exaltés, inhibés par des drogues et ce peuple souffrant gardant un magnifique sang-froid, attentif à son unité. Des différences s’expriment mais la vive conscience du tragique est mobilisatrice d’une détermination à être ensemble pour faire face à d’autres risques et peut-être d’autres drames.
Notre peuple n’attend pas passivement, il est mu par ses valeurs qui, lorsqu’elles sont touchées, suscitent un élan qui transcende les inessentiels pour refuser l’insoutenable et l’inacceptable comme viennent de le déclarer toutes les familles humanistes et spirituelles.
Il nous faut rechercher les causes de radicalisation et ne pas seulement les dénoncer ; elles ne sont pas toutes étrangères à un urbanisme qui, déjà en 2005, suscita un état d’urgence, alors circonscrit aux territoires confrontés à la guérilla urbaine.
Un grand chantier doit s’ouvrir pour briser l’enfer de ceux qui habitent ces quartiers. Il est urgent de ne plus laisser du temps à cette violence sourde, alimentée par la misère qui brise l’avenir de trop de jeunes.
La liberté est un appel à veiller à ce que les plus vulnérables trouvent les conditions d’une dignité ; elle n’est pas assurée à ceux condamnés à survivre dans des quartiers de non-droit, touchés non seulement par la ghettoïsation mais par une forme d’apartheid. L’expression heurte, mais elle est juste pour traduire la réalité de ces lieux de graves ruptures de la cohésion sociale.
Si le combat auquel nous sommes appelés pour défendre nos valeurs nécessite d’intervenir sur le sol de l’Etat islamiste – et il n’a pas tardé ‑ il doit aussi être conduit sur le nôtre pour éradiquer le cancer péri-urbain dont les métastases laissent le champ à l’esclavage des esprits.
Bernard Devert
16 novembre 2015
Entièrement d’accord sur ce que nous pouvons faire tous à notre échelle sur notre territoire. Ayant passé mon enfance dans un quartier parisien du 19*ème, mal famé, à forte population algérienne (pleine guerre d’Algérie) je sais que le mal logement, le manque de travail, l’inactivité sont sources de révolte. On a démoli la Goutte d’or dans le 18ème pour reloger les habitants à nouveau dans des gettos, plus loin. Hélas, plus de 50 ans plus tard, la situation n’a fait que s’aggraver, et les jeunes de ces cités sont pleins de haine. Au delà des clivages il nous faut de plus en plus prendre conscience de cela et revoir notre politique de logement.
Belle minute de silence ce matin à Bonnelles avec les syriens, irakiens, afghans, les bénévoles et Balthazar. Cela réchauffe le cœur.
Bien à vous
Chère Madame, Je vous sais gré de m’avoir partagé votre réflexion sur ces dramatiques assassinats de vendredi à Paris. Votre analyse va plus loin que la mienne pour ne pas réduire l’une des causes de la radicalisation aux quartiers de non-droit. J’ai à dessein circonscrit mon propos, un lecteur me disant que c’était maladroit de mettre en cause notre Pays pour ajouter au drame une sempiternelle culpabilisation. Pourtant, comment ne pas reconnaître les discriminations de jeunes musulmans quant à l’emploi, la formation, le logement ; elle n’est malheureusement pas étrangère à cette radicalisation.Merci de ce signe amical que vous avez bien voulu m’adresser ; il est un encouragement à poursuivre. Très cordialement.
Dans le film « La haine », il y a exactement…. 20 ans, j’avais été sidéré par cette énorme violence dans les cités. Dans une des scènes, il y avait la blague du gars qui tombe du 40èeme étage, et dans le vide, à chaque étage passé, dit : « jusque la, ça va »…. Aujourd’hui, après 20 années passées à se dire que jusque là, ça va, on y est, on arrive au sol….Pas encore tout à fait, à mon avis, il reste encore 1 étage ou deux pour réagir…Pas plus…..
Cher Monsieur, je vous sais gré de m’avoir partagé votre réflexion sur ces dramatiques assassinats de vendredi à Paris. Votre analyse va plus loin que la mienne pour ne pas réduire l’une des causes de la radicalisation aux quartiers de non-droit. J’ai à dessein circonscrit mon propos, un lecteur me disant que c’était maladroit de mettre en cause notre Pays pour ajouter au drame une sempiternelle culpabilisation. Pourtant, comment ne pas reconnaître les discriminations de jeunes musulmans quant à l’emploi, la formation, le logement ; elle n’est malheureusement pas étrangère à cette radicalisation. Merci de ce signe que vous m’avez adressé ; il est un encouragement à poursuivre. Très cordialement. Bernard Devert