Quand « Mister sens » s’invite dans l’économie

L’économie solidaire, un oxymore ! Ces deux mots semblaient ne jamais pouvoir faire attelage. Or, voici que, depuis quelques années, ils cavalent jusqu’à donner à la finance un prix inattendu, celui d’un acteur possible de la transformation sociale.

L’encyclique Laudato si trouve ici un réel moyen d’expression, non pas la croissance pour la croissance mais le développement intégral où les plus fragiles ne sont pas absents.

L’apôtre des Gentils disait : c’est lorsque je suis faible que je suis fort. L’économie solidaire est ce « petit David » qui, sans crainte, fait trembler « les Goliath ».

Longtemps, il fut sage de distinguer, plus encore de séparer, le business de la générosité qui n’avait de place que dans un autre champ bénéficiant des dons liés au ruissellement de l’économie. Le pape François a souligné combien ce ruissellement était un leurre, souvent un alibi.

Il est apparu un « chevalier blanc » ; il a pour nom « Mister sens », mettant tout sens dessus-dessous. Ce qui apparait fort, sans impact social réel, n’est enfin plus considéré comme juste. Ne l’est que ce qui crée de la justice.

L’économie solidaire en est le chantre.

Quels en sont les acteurs ? Des petits princes venus déranger des hommes très occupés, afférés. L’inouï a surgi ! lorsque leur fut présentée l’économie solidaire, ils prirent le temps de rêver. Et si toutes ces étoiles appréhendées, possédées, éclairaient l’avenir de tous. Un discernement lumineux ! Il ne s’agit plus d’acheter encore et encore d’autres étoiles, de les empiler, mais de les répartir.

L’idée de possession se trouve interrogée par le sens. Le « chevalier blanc » suscite une clarté chaque fois que l’économie est au service de l’homme, de tous les hommes.

Ainsi, craque une certaine économie pour donner naissance à des activités dont la rentabilité immédiate n’est pas le critère premier. L’acte de gérer n’est plus de prévoir ce qui est sans surprise, sauf pour les traders, il est d’être connecté à l’attente de ceux qui n’ont rien ou si peu.

L’économie solidaire, confrontée à la fragilité, est mère du changement. Elle trouve sa planète, la terre, appelée à être habitable pour tous, chacun étant regardé comme absolument unique. Un changement de paradigme qui écroule nombre de ces idées toutes faites, évaluées jusque-là comme des citadelles imprenables.

Les chiffres parlent; ils ne sont pas ceux de la 4ème planète qui a tant déçu le Petit Prince, pour traduire un entassement de ce qui est possédé sans désir du partage.

Les chiffres s’effacent derrière ces visages. Regardons-les, ils nous sourient pour vivre un apprivoisement qui fait de nous tous des humains. Comment ne pas s’en réjouir, d’autant que ce qui est ici commencé est appelé à traduire cette richesse sans prix qu’est la liberté intérieure, nous embarquant vers le bien commun d’une épargne solidaire.

Il s’agit d’un investissement, non, d’un don, mais d’un engagement donnant du sens et une fierté partagée, celle de la fraternité conférant à l’économie sa raison d’être et à ses acteurs une noblesse sans pareil.

Habitat et Humanisme, comme pionnier, est conscient que, pour aller plus loin dans cette forme d’économie positive, il lui faut la penser spirituellement. Sa venue à l’Abbaye de Belloc n’est pas étrangère à cette recherche.

Bernard Devert

Novembre 2021

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