Avec le temps des vœux, il s’est dit beaucoup de choses, accompagnées de belles promesses et c’est heureux, dans ces moments où la tentation est parfois grande de se résigner à la tristesse. Balzac traduit ce mot de résignation comme un suicide quotidien.
Au diable le défaitisme.
Il s’agit de vivre ce que nous avons souhaité, de concrétiser les promesses échangées dans cette conscience partagée qu’il y a tant à faire. Nous ne pouvons pas tout faire, certes, mais au possible nous sommes appelés. Il nous faut veiller à nous défaire des illusions ou de ces simples indignations faciles et peu fertiles pour ne rester que des mots, sans capacité aucune de détruire les maux et le malheur.
L’heure est d’entrer résolument dans un optimisme de volonté ; quelle libération, après discernement, de décider des changements à mettre en oeuvre. Alors se retire la mocheté qui rôde, accable, destructrice de l’espoir, quand ce n’est pas de l’espérance.
Il y a tant à faire. Ne perdons pas notre énergie à faire chorus avec ces voix délétères, complaisantes aux lamentations, qui trouvent tant d’oreilles attentives aux sombres prédictions.
Le marché du catastrophisme est loin d’être en crise tant il rapporte à ses thuriféraires ; le plus grave, c’est qu’il tente de s’imposer laissant entendre que tout se vaut. En d’autres termes, rien ne vaut si bien que les valeurs fondatrices de notre Société s’en trouvent menacées.
L’avenir ne se construit que si l’idéal est protégé du cynisme et de la marchandisation.
Il nous appartient de veiller à ce que notre Société ne s’enlise, ni ne se glisse dans les ténèbres. Les sérieux changements que nous connaissons ne sont pas sans donner prise aux agitations et hésitations. Que faire, se lever et se tenir debout sans perdre son temps à s’opposer aux idées funestes, laissant à la générosité et l’attention à l’autre le soin de les faire disparaître pour ensoleiller la vie.
Jacques Brel à ces mots justes : « je vous souhaite des rêves à n’en plus finir. Et l’envie furieuse d’en réaliser quelques-uns ».
Le mieux pour en finir est de s’ouvrir à l’infini. Il ne s’agit pas d’une option mais d’une magnifique proposition de vie qu’exprime si justement Saint-Exupéry parlant de l’avenir, non comme une invitation à le prévoir, mais un appel à le rendre possible.
Là, l’étonnement se fait jour jusqu’à faire jaillir ce cri joyeux de l’intelligence et du cœur : « c’est donc possible ». Tout commence, recommence dans cette soudaine clarté, source de l’enthousiasme et de l’émerveillement
Il m’est une joie de vous partager ce poème Jean-Luc Grasset traduisant cet infini et cet émerveillement avec des mots qui portent et nous transportent :
Il suffit de peu pour que le soleil naisse sur un lit de feuilles jaunies, là-bas dans les cendres des nuages. La fragilité du monde devient si précieuse que Dieu marche pieds-nus pour ne pas le briser. Quand nous reconnaissons enfin ses pas, son dos s’est voûté dans les montagnes et je m’étonne de tant de clarté après son passage.
Ce passage n’est-il pas ce moment où nous décidons de bâtir un monde plus humain. Le pessimisme vacille et même craque pour ne pouvoir s’opposer à cet élan conduisant vers ces sommets possibles, joie de l’étonnement.
Bernard Devert
Janvier 2023